

Shinsui Itō (Japanese, 1898 – 1972)
Tu as la voix du sable et les gestes du vent
Je suis l’exclu du monde
Tu es vive comme un tourbillon
Je suis comme mort par des atteintes à mes libertés
Tu surfes sur les lignes d’horizon
J’apprends les limites de mon existence
Tu es belle avec un regard de lumière
Je creuse la nuit avec mes mains
Tu chantes des désirs non-dits
Je me cache dans ton corps pour dire
Et c’est seulement maintenant à la frontière
de mon masculin et de mon féminin
que nous nous retrouvons avec des baisers collés aux lèvres
que nos bras s’évanouissent dans la brume
que nos vies s’échappent et se rapprochent en même temps
Et c’est maintenant que nos âmes rejoignent les corps du peuple
que nos pensées d’or et de fleurs s’étalent sur les plages de l’imaginaire
que nous rencontrons les différences
pour s’accrocher définitivement à la vie

Le silence de la forêt
rebondit de vallées en vallées
jusqu’au tam-tam de la ville
**
Les gazouillis éphémères de la biodiversité
reflètent l’absence de la vie
Brouhahas des hommes recouvrant le silence
**

Renoir
J’embrasse la bouche de l’âme
La révolution n’est pas révolue
car lire beaucoup ouvre des horizons
**
J’ai mis des ailes entre mes fesses
et quand je fais un vent
elles s’envolent en plume sur tout l’Occident
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Le ciel est bleu
D’avantage de confitures
sur les tartines de la vie
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Je vois dans le ciel du Nord
des cerfs volant et tirant un traîneau
Cette année je n’arrive pas à fermer mon manteau
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La mort qui rôde près de moi comme un fauve
aimerait me dévorer pour assouvir sa faim
La vie malgré moi gagne du terrain chaque jourpour m’offrir la beauté du monde
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Je suis enlacé par les bras de la Terre
Revivre avec les sols morts étranglés par des produits toxiques
Introduire des millions de vers de terre en amants exaltés dans une symbiose symphonique
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Mettre maître après mètre des invisible barrières
pour danser sur les fils d’araignées
et recadrer les énergies
**
Les humains prennent sens
dans leurs paroles et leurs actes
La phénoménologie ça donne quoi ?
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Les branches fleuries s’épanchent sur l’onde
Elles boivent à satiété
toute l’ivresse du monde
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Haïku tronqué
Quand cochon dinde
Noël n’est pas loin
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Beau sonnè qui douille à 45 pieds et quelques
Ça sait de la popoésie décacadente
Il n’y a bau que le poem glisser dans la culotte mère avec débri de cotton club pour encaquer le vocabulère et éponger les ficelles de gras dégoullinnantes à force de grandir dans l’essouflement de la gramaire bêêelante.
Yes, il faut que je nique touttes les entraves de la langue pour resucer la moille épinière des premières Formule 1 de l’écriture.
Dans des Kavernes sombreros, les first hommes mâle né-grossi viennent rejoindre les pouêt pouêt né après 2000 qui smartphone des maux suggestifs à tous les enculé$ de la Terre.
Que l’Esprit Sein couronne nos frases échangistes avec les fosses sceptiques de l’enfer.
Que la langue fendue du serpent sépare nos sexes transgenre en tranche de gensbon et dégobillage assuré de cochon travesti en lapine sauterelle.
Je te fend l’anus en pièces ajoutées sur la bûche de Noel klaxonnée par des files interminables de voix-tures, avec des touchers rectaux aux barrages de péage.
On célèbre enfin la dernière air de l’hommus descendu du singe pour mourir au fond de la terre avec des verres qui circulent entre les bouches dénaturées par la décomposition du dernier poem grave, enterrant la langue dans le caveau du crâne pour l’éther niqué .
Allez houille là là
Alleluia
Signé baby senior : Benoist Magnat de la Sauce première
Ecrit le 26 décembre 2021 avec la langue pendue d’un vieux puber au smartphone pour accrocher le sexe avec son âmeçon pendouillard.
Poème, haïkus et pamphlet de Benoist Magnat
Ecrits en cette fin d’année

« La vie est une lutte,
La vie est une dure lutte,
La vie est une turlutte »
Corinne Masiero

Egon Schiele, « L’étreinte », 1917.
Serre-moi dans tes bras
Embrasse-moi
Embrasse-moi longtemps
Embrasse-moi
Plus tard il sera trop tard
Notre vie c’est maintenant
Jacques Prévert, « Embrasse-moi », 1948.
Rencard des momies
mots mis au rencard
Le mot cœur moqueur
le mot tête moqué
le mot nu mental
mot-mot révolté
Le mot viscéral
enfin libéré
Plus bas que la ceinture
plus haut que la sainteté
Femme
le mot nu vrai
Fleur
le mot mû gai
Jacques PREVERT
A Cassis comme ailleurs
Ne videz pas la poubelle dans le frigidaire, il pourrait se mettre en colère.
N’agacez pas, n’empoisonnez pas, n’emmerdez pas la mer, elle est capable de se venger.
Et
si vous continuez à tourner la terre en dérision, un beau jour, elle vous éclatera de rire au nez.
Jacques Prévert

La nuit n’est jamais complète.
Il y a toujours,
puisque je le dis,
Puisque je l’affirme,
Au bout du chagrin
Une fenêtre ouverte,
Une fenêtre éclairée
Il y a toujours un rêve qui veille,
Désir à combler,
Faim à satisfaire,
Un cœur généreux,
Une main tendue,
Une main ouverte,
Des yeux attentifs,
Une vie,
La vie à se partager.
Paul Eluard.

Je retrouverais le secret des grandes communications et des grandes combustions. Je dirais orage. Je dirais fleuve. Je dirais tornade. Je dirais feuille. Je dirais arbre. Je serais mouillé de toutes les pluies, humecté de toutes les rosées. Je roulerais comme du sang frénétique sur le courant lent de l’oeil des mots en chevaux fous en enfants frais en caillots en couvre-feu en vestiges de temple en pierres précieuses assez loin pour décourager les mineurs. Qui ne me comprendrait pas ne comprendrait pas davantage le rugissement du tigre.
Aimé Césaire, extrait du Cahier du retour au pays natal (éditions Présence Africaine)

Trois poèmes de sa série « Les roses »
Été : être pour quelques jours
Été : être pour quelques jours
le contemporain des roses ;
respirer ce qui flotte autour
de leurs âmes écloses.
Faire de chacune qui se meurt
une confidente,
et survivre à cette soeur
en d’autres roses absente.
J’ai une telle conscience
J’ai une telle conscience de ton
être, rose complète,
que mon consentement te confond
avec mon coeur en fête.
Je te respire comme si tu étais,
rose, toute la vie,
et je me sens l’ami parfait
d’une telle amie.
Je te vois, rose
Je te vois, rose, livre entrebâillé,
qui contient tant de pages
de bonheur détaillé
qu’on ne lira jamais. Livre-mage,
qui s’ouvre au vent et qui peut être lu
les yeux fermés …,
dont les papillons sortent confus
d’avoir eu les mêmes idées.
Rainer Maria RILKE (1875-1926)
Trois poèmes de sa série « Les roses »

ORDRE DU JOUR
Se délier de nos rêves de la nuit
S’en déprendre pour mieux les apprendre
Pour mieux les comprendre
Les quitter pour mieux les retrouver
Paradoxer le réel avec ces herbes folles incrustées dans les murs
Croire au souffle puissant de ces battements d’ailes de papillon
Calculer l’improbable dans le dos des mathématiciens
Mentir de bonne foi aux accoucheurs de vérités
Puis s’endormir et rêver…’
Pierre Platon
Les archers du présent
En ces temps de joies tristes
nous appellerons bonheur toute seconde où la volée de la flèche
n’atteindra pas encore la cible que le hasard lui a fixée
Nous n’offrirons rien à personne
nous mettrons aux enchères pour les cœurs puissants
ces fragiles présents de l’archer du temps
Il ne conviendra pas de la moindre redorure
à apporter à ces bibelots égarés d’un passé plus certain
que tous les futurs masqués ou démasqués
Quémander de la joie est un parjure indigne
une offense dérobée à l’avenir
un anneau brisé de la chaîne des jours et des nuits
C’est folie d’architecte que de bâtir sur du sable
où ne s’échoueront plus que les radeaux des mendiants
sous les rires moqueurs des mouettes
A l’heure où nos désirs sont désordre
et sous les auspices du non-alignement des planètes
je tiendrai pour traîtrise toute dérobade à la quête du bon
Pierre Platon

A l’encre de tes rêves
A l’encre de tes rêves
Tu peux faire des miracles
Dans tous les coins de la Terre
A l’encre de tes rêves
Tu peux d’un coup de baguette magique
Changer la face du monde
A l’encre de tes rêves
Tu peux mettre la nuit
A la place du jour
A l’encre de tes rêves
Tu peux devenir plus riche
Que tous les milliardaires
A l’encre de tes rêves
Tu peux changer le sort
De tous les crève-faim
A l’encre de tes rêves
Tu peux monter aux cieux
Voler la vedette à Dieu
Pour gouverner le monde
A l’encre de tes rêves
Tu peux aussi l’espace d’une nuit
Ecrire des chefs-d’oeuvre
Mieux que les prix Nobel
Mais sache que les rêves
Sont des enfants mort-nés
Qui n’ont pas eu la chance
D’avoir les pieds sur Terre
Et qu’ils sont moins solides
Et même plus liquides
Que les rêves du jour
Jean SAINT-VIL
le 3 décembre 2021

La Nuit, quand le pendule de l’amour balance entre Toujours et Jamais, ta parole vient rejoindre les lunes du coeur et ton oeil bleu d’orage tend le ciel et la terre. D’un bois lointain, d’un bosquet noirci de rêve l’Expiré nous effleure et le Manqué hante l’espace, grand comme les spectres du futur. Ce qui maintenant s’enfonce et soulève vaut pour l’Enseveli au plus intime : embrasse, aveugle, comme le regard que nous échangeons, le temps sur la bouche. Paul Celan, extrait du recueil Pavot et mémoire, dans la traduction de Jean-Pierre Lefebvre. |

Andy Wharol
Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D’une femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime
Et qui n’est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m’aime et me comprend.
Car elle me comprend, et mon coeur, transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d’être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.
Est-elle brune, blonde ou rousse ? – Je l’ignore.
Son nom ? Je me souviens qu’il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la Vie exila.
Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L’inflexion des voix chères qui se sont tues.
Paul Verlaine, « Mon rêve familier », 1866

Dessin Michel Tava
Ne laisse pas le soin de gouverner ton coeur à ces tendresses parentes de l’automne auquel elles empruntent sa placide allure et son affable agonie. L’oeil est précoce à se plisser. La souffrance connaît peu de mots. Préfère te coucher sans fardeau: tu rêveras du lendemain et ton lit te sera léger. Tu rêveras que ta maison n’a plus de vitres. Tu es impatient de t’unir au vent, au vent qui parcourt une année en une nuit. D’autres chanteront l’incorporation mélodieuse, les chairs qui ne personnifient plus que la sorcellerie du sablier. Tu condamneras la gratitude qui se répète. Plus tard, on t’identifiera à quelque géant désagrégé, seigneur de l’impossible.
René Char

Шёл Дед Мороз один пешком по лужам…
Шёл Дед Мороз один пешком по лужам,
Традиционный Красный нос, слегка простужен,
Он тихо бормотал, ворчал себе под нос:
«А, чтоб его! Циклон под Новый год принёс!
Ах, если б был хотя бы нынче минус,
Всё к лучшему в момент переменилось! »
Тот Дед Мороз – он был ещё без стажа,
Не знал ещё – всё слышит Божья стража!
И там где только грязь была и лужи
Ледок возник, А Дед ворчал: « Что хуже?
Мне носом шмыгать, ноги промочив?
Или с мешком в метель кружить в ночи?»
На яркий огонёк и к печке в нОчи жаркой
Шёл Дед Мороз, спешил дарить подарки.
Le père Noël marchait seul à pied dans les flaques d’eau
Le père Noël marchait seul à pied dans les flaques d’eau,
Il avait un nez rouge traditionnel. Il avait un rhume.,
Il murmura doucement sous son nez:
«Et, pour son! Le cyclone a été apporté sous le Nouvel an!
Ah! Si le gel a frappé, alors
Tout a changé pour le mieux à un moment donné ! »
Ce Père Noël était encore sans expérience,
Il ne savait pas encore que la garde de Dieu entendait tout!
La glace est née là où la boue et les flaques d’eau venaient d’être.
Et le Grand-père grogna « » qu’est-ce qui est pire?
J’ai le nez qui coule. Je me suis mouillé les pieds.
Je tourne avec un sac dans une tempête de neige dans la nuit»
Le père Noël marchait là où une lumière vive brûlait dans un four chaud dans la nuit.
Il était pressé de donner des cadeaux.

« Que vous avons-nous apporté
Nous qui, de la première,
La seconde ou la énième génération,
Sommes en exil
En nous-mêmes
Et n’avons d’autre orgueil
Que le nom que nous portons,
D’autre richesse
Que des souvenirs en lambeaux rouges et noirs,
D’autre force que celle du rire aux dents blanches
Et des larmes rentrées ? »
[…]
Nous vous avons apporté la France,
La France telle que nous la rêvions,
La France libre, solidaire, amicale, généreuse, […] »
Ricardo Montserrat

Je prendrai par la main les deux petits enfants ;
J’aime les bois où sont les chevreuils et les faons,
Où les cerfs tachetés suivent les biches blanches
Et se dressent dans l’ombre effrayés par les branches ;
Car les fauves sont pleins d’une telle vapeur
Que le frais tremblement des feuilles leur fait peur.
Les arbres ont cela de profond qu’ils vous montrent
Que l’éden seul est vrai, que les cœurs s’y rencontrent,
Et que, hors les amours et les nids, tout est vain ;
Théocrite souvent dans le hallier divin
Crut entendre marcher doucement la ménade.
C’est là que je ferai ma lente promenade
Avec les deux marmots. J’entendrai tour à tour
Ce que Georges conseille à Jeanne, doux amour,
Et ce que Jeanne enseigne à Georges. En patriarche
Que mènent les enfants, je réglerai ma marche
Sur le temps que prendront leurs jeux et leurs repas,
Et sur la petitesse aimable de leurs pas.
Ils cueilleront des fleurs, il mangeront des mûres.
Ô vaste apaisement des forêts ! ô murmures !
Avril vient calmer tout, venant tout embaumer.
Je n’ai point d’autre affaire ici-bas que d’aimer.
Victor Hugo, « Je prendrai par la main les deux petits enfants », extrait du recueil L’art d’être grand-père.

et maintenant une porte un visage et derrière eux le mur quand même
parfois la vie tombe dans le regard et devient l’envers de l’horizon
un souffle alors s’en va vers son pareil pour voir à quoi ressemble l’invisible
tout se déplie quelques lignes quittent la main pour faire en l’air des rides
mieux vaut que les signes s’effacent et avec eux le temps des illusions
peut-être saura-t-on sans eux apprivoiser la blessure et le manque
ou bien les recoudre avec un peu d’oubli et de sauvagerie
le regard cherche à présent sa propre trace afin de se voir être
et le corps suit le mouvement pour unir l’espace et sa présence
c’est un rêve où l’instant absorbe la durée puis la vomit et meurt
rendu qui rend à la réalité tout le poids de son inexorable
une rumeur l’annonce puis demeure coincée dans le fond de la gorge
le destin auquel on ne croyait plus devient tout à coup étouffant
la vieille peur sans cause raisonnable occupe maintenant la poitrine
qu’est-ce que la vie demande-t-on conscient de la bêtise
mais désireux de faire un peu de bruit intime à contre danger
le temps lui aussi est un lieu à sens unique où n’a lieu que le temps
Bernard NOEL – 1930-2021
Extrait de son recueil « Paroles d’encre » (2012)
« Tout ce qui te délivre
Du poids des origines
Des mailles de toute naissance
Et des cloisons du temps
C’est encore cette lueur :
Ta liberté enfouie
Brûlant ses limites
Pour s’évaser devant. »
Andrée CHEDID
Bonne année 2022 à tous et à toutes
(si cela est possible)
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